Elle veut partir maintenant.
Tout de suite !
Au cinquantième jour de cette réclusion la libraire veut s’en aller et prendre la voiture pour rouler, rouler vers la montagne ou la mer, peu importe mais loin, loin.
Elle veut aller marcher dans la forêt, retrouver la poésie de la découverte.
Est-ce qu’il y aura encore du muguet dans les sous bois ?
Elle veut photographier des pissenlits, de tout près, juste avant que le vent ne disperse leurs aigrettes.
Le monde entier l’attend et elle veut, maintenant, tout de suite, le retrouver et se rouler dedans.
Ce texte est écrit avec une contrainte de 6 mots, donnés par Jacques:
poésie, marche, muguet, pissenlit, librairie, photographie !
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Caillou le 4 mai 2020
Et le texte de Maryse
Illusion,
Une petite fenêtre de liberté s’ouvre !
Demain on pourra s’évader. Mais, attention ! Pas plus de 100km. Cloîtrée depuis un mois, je passe du temps à regarder les vieilles cartes postales que je collectionne et les photographies de famille. J’étale pêle-mêle un tas de photos jaunies et mon regard est attiré par l’une d’elle. Une place de village, des tables chargées de victuailles sous une ronde de platanes vigoureux. Rien ne manque ! Un brin de muguet près de chaque assiette. La convivialité qui s’en dégage me réchauffe le cœur en ces temps de solitude forcée. Un peu à l’écart, une fontaine autour de laquelle des hommes, chemise blanche et pantalon noir, celui qu’on sortait pour le mariage du fils, des femmes vêtues de robes printanières et quelques enfants habillés avec “les vêtements du dimanche”.
Je retourne la photo et déchiffre les restes de quelques mots délavés par le temps : “Confinoux, 1er mai 1913”. Ce nom ne m’est pas complètement étranger, c’est l’époque de mon arrière grand-père que je n’ai pas connu. Je me souviens vaguement avoir entendu ma grand-mère parler de ce village, dans le Tarn, de sa douceur et des pissenlits qu’elle ramassait pour faire une soupe dont elle seule avait le secret. C’est décidé, j’irai à Confinoux.
Vite j’attrape ma tablette, Mappy et hop je cherche “Toulouse/ Confinoux”. Pourvu que ce soit dans le rayon autorisé! L’écran s’affiche, 97,3 km. Ouf !
”Demain matin, dès l’aube je partirai”, le premier vers de cette poésie que j’aime tant s’échappe de mes lèvres. Avant de me coucher, je passe à la librairie vérifier que j’ai bien baissé le rideau de fer. Toute excitée à l’idée de ce voyage dans le temps, je peine à m’endormir.
Enfin, le chant des oiseaux me réveille. Je m’habille légèrement, le temps est clément, j’avale en vitesse un café, ferme la porte d’entrée et me retrouve au volant de ma voiture. Je pose la photo sur le tableau de bord, branche mon GPS et je démarre.
Personne sur la route, la campagne est belle. Seule la voix d’hôtesse de l’air de mon GPS me sort de mes rêveries “au prochain rond point, prenez la deuxième sortie à droite”. Et je vois “Confinoux, 3km”. J’y suis. Je me gare à l’entrée du village me disant qu’une petite marche me fera du bien.
La photo à la main, j’arpente les ruelles pavées, bordées de coquettes maisons aux balcons fleuris. Il est encore tôt, le village est calme. Je vois un panneau “Mairie”. Souvent la mairie se trouve sur la place centrale, je prends donc cette direction. Quelques mètres et j’y suis. Je regarde la place puis la photo, essaye de trouver un repère. Ce n’est pas possible ! Il doit y avoir une autre place. Je regarde à nouveau la place, il y a deux platanes rescapés de la tronçonneuse, la petite fontaine. C’est bien elle ! Mais au milieu, en lieu et place des tables du banquet, un parking. Le rêve est terminé. En rejoignant ma voiture je me surprends à fredonner la chanson de Dutronc “c’était un petit jardin qui sentait bon le métropolitain….”
Ainsi que celui d’Annick
Floraison printanière
La poètesse marche sur une corde,
funambule la nuit, eau dormante le jour.
Finit le mètre, finit la rime, seulement des ondoiements
de l’âme, feuilletés par des mains aimantes
dans les librairies au coeur des villes .
Sur les partitions poussent le muguet et le pissenlit
Muguet et Amour associés pour toujours
Bouquet des fleurs du mal depuis
que Pétain l’a fait rimer
avec révolution nationale et travail
Le pissenlit, vivace hermaphrodite, n’a besoin de personne
Inflorescence jaune, grand capitule isolé,
Il nourrit soigne et guérit.
Cette herbacée, sait se rendre utile et sa poésie
célébrée par les grands toqués de la cuisine
attendrit les coeurs nostalgiques de l’enfance
paysage figé par la photographie
Souvenir blafard et jaunie.
Bravo à toutes et à toi !
Ah les mots et les maux ! Bon six autres :
rugby, poteaux, supporters, conneries, vociférations, omette aux champignons !
Facile !
Eh, moi aussi ça me tape sur le système, j’ai ouvert gougueule earth pour chercher Confinoux !! Il y a bien un Confines en Colombie, un chemin des Confinés à Sorgues, un autre à Châteauneuf-de-Gadagne, et à Vedène, et encore à Monteux, et Saint-Saturnin-lès-Avignon, un Confignon en Suisse, mais Confinoux oualou. Bon, c’est un pays de rêve, ça tombe bien, je suis passionné de rêves…
Je n’ai pas imaginé que quiconque irait faire des recherches sur mon Confinoux sorti tout droit de mon esprit confiné ! Recherches qui m’ont permis de voyager….
Maryse