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« OUBLIER CAMUS » d’Olivier CLOAG

Critique d’un pamphlet.

Un petit livre, de 160 pages, paru en septembre 2023 aux Éditions La Fabrique fait un tabac dans les milieux intellectuels, militants et chez les amoureux d’Albert Camus. 64 ans après sa mort, un universitaire de Caroline du Nord aux États-Unis propose d’oublier Camus.

 

En trois parties :

1° Ce pamphlet est un torchon bourré de citations tronquées, d’interprétations tendancieuses, de falsifications historiques, de rumeurs invérifiables.
Il est anachronique, car incapable de se replacer dans la période historique, qui date de plus de 70 ans. Il juge Camus au nom d’une idéologie contemporaine, moraliste, américaine, le décolonialisme, que l’on peut rapprocher des théories post-modernes de déconstruction.
2° Heureusement Albert Camus a beaucoup écrit et on peut trouver assez facilement ce qu’il disait, pensait et sentait, politiquement et humainement sur son pays de naissance l’Algérie. Une partie de cette critique va donc constituer à s’appuyer sur les textes mêmes d’Albert Camus pour remettre les choses en place, jeter l’ouvrage de Mr Cloag à la poubelle et enfin, relire Camus
3° Car le lire, maintenant, dans cette impasse épouvantable de la guerre entre Israël et le Hamas, c’est aussi un formidable rappel du courage d’être humain. C’est un appel aux hommes et femmes de paix, aux refus des haines qui divisent et de la violence qui ne fait qu’engendrer la violence.

1° Un torchon
Commençons par une citation tronquée :
Page 16
Notons ce qui ne choque pas Camus :
le détail du salaire horaire des uns et des autres, les Algériens gagnant après les grèves 2,30 frs et les pieds-noirs 7,20 Fr.
Camus ne remet pas cette injustice criante en cause, au contraire, il la prend comme donnée absolue dans ses calculs. C’est l’acceptation de l’axiome impérial : les Européens gagnent plus que les Algériens à travail égal.
Du coup je vais chercher l’article de Camus dans Alger républicain du 12 octobre 1938
et je trouve :
La spéculation contre les lois sociales
… La hausse des salaires a donc un peu amélioré la situation du manœuvre indigène. Mais lorsqu’il s’agit d’un homme qui gagnait 11 frs 20 par jour, on sent bien qu’une amélioration de cet ordre n’est encore qu’un pis-aller.

Page 21 :
les colons européens vivent cette décision comme une atteinte à leurs privilèges.
Mais qu’est-ce qu’un colon ? Dans le dictionnaire Robert, je lis :
Personne libre attachée héréditairement au sol qu’elle exploite.
Personne qui est allée peupler ou exploiter une colonie.
Habitants d’une colonie.

En langage commun, un colon c’est un propriétaire terrien. Donc une minorité des européens d’Algérie, plutôt habitants des villes, et artisans, commerçants ou employés.
Olivier Cloag essentialise tous les Européens d’Algérie sous le terme de colon.
Voyons ce qu’écrit Albert Camus sur le terme « colon » :
Chroniques Algériennes : Page 359 des œuvres complètes
LA BONNE CONSCIENCE
Entre la métropole et les Français d’Algérie, le fossé n’a jamais été plus grand. Pour parler d’abord de la métropole, tout se passe comme si le juste procès, fait enfin chez nous à la politique de colonisation, avait été étendu à tous les Français qui vivent là-bas. À lire une certaine presse, il semblerait vraiment que l’Algérie soit peuplée d’un million de colons à cravache et à cigare, montés sur Cadillac.
Cette image d’Épinal est dangereuse. Englober dans un mépris général, ou passer sous silence avec dédain, un million de nos compatriotes, les écraser sans distinction sous les péchés de quelques-uns ne peut qu’entraver, au lieu de favoriser la marche en avant que l’on prétend vouloir. … /… 80 % des Français d’Algérie ne sont pas des colons, mais des salariés ou des commerçants.

Page 24 :
Le soutien de la gauche en Algérie au projet Blum/Violette est considéré par Cloag comme le meilleur moyen de neutraliser toute velléité d’indépendance :
Considérant que loin de nuire aux intérêts de la France, ce projet les sert de la façon la plus actuelle. Dans la mesure où il fera apparaître aux yeux du peuple arabe le visage d’humanité qui doit être celui de la France.
En adoptant cette attitude, Camus ne remet donc pas en cause la structure coloniale. S’il est exact que Camus est assimilationniste, donc pour une assimilation des Algériens à la République française, dont les premiers pas étaient la proposition Blum Violette cela ne signifie nullement qu’il était pour la colonisation.

Page 26
Puis quand le Parti Communiste (Algérien) quitte ce soutien à la réforme Blum/Violette alors Camus quitte le PCA. C’est à ce moment en 1937 que Camus quitte le parti communiste algérien… C’est un mensonge pur et simple ! Voilà ce qu’écrit l’historien Guy Pervillé dans une conférence :
Ainsi s’explique son adhésion juvénile au PCA, à la fin de l’été 1935. Il en fut exclu deux ans plus tard parce qu’il refusait le reniement de la solidarité anticolonialiste avec l’Étoile nord-africaine puis le Parti du peuple algérien (PPA) de Messali Hadj au nom de l’antifascisme.
(http://guy.perville.free.fr/spip/article.php3?id_article=274

Page 27
Pour Cloag quand Camus écrit sur la misère en Kabylie (page 27) c’est pour montrer que la France ne fait pas ce qu’il faut. Même si le journal ou il publie ces articles est interdit, cela prouve qu’il soutient la colonisation. Il suffit de lire « misère en Kabylie » pour voir le contresens absolu.
Page 1413 des œuvres complètes : Notice. Camus et l’Algérie.
D’une enquête en Kabylie, il rapporte, en juin 1939, les onze articles de « Misère de la Kabylie », description minutieuse des ravages de l’organisation économique et sociale mise en place par le système colonial. Le ton est modéré, mais la dénonciation implacable ; dorénavant, Camus est aux prises avec une censure qui le réduit au chômage l’année suivante, ce qui l’oblige à partir pour Paris.

Page 31
Quand Camus n’écrit pas sur les massacres de Sétif et Guelma, cela prouve qu’il soutient la répression. Ce qui est totalement faux. Camus écrit :
Chroniques Algériennes : Page 360 des œuvres complètes.
Qui, en effet, depuis trente ans, a naufragé tous les projets de réforme, sinon un Parlement élu par les Français qui fermait ses oreilles aux cris de la misère arabe, qui a mis que la répression de 1945 se passe dans l’indifférence, sinon la presse française dans son immense majorité ? (Note : Sur les évènements de Sétif.)

Donc qu’il écrive ou pas Camus est un colonialiste.
Ce livre est donc bourré de contresens.
À partir de là je me méfie de toutes les citations tronquées.

On en arrive à l’affirmation page 34 qui cite 5 lignes :
Entre ces deux causes, celle de l’humanisme et celle de l’Algérie française, Camus a effectivement choisi la seconde. Le masque tombe quand il dit à Quillot, en septembre 1959, « si l’Algérie devient indépendante, je quitterai la France. Je partirai au Canada. 48 »
Je cherche la source. Gloag indique par une note N° 48 : Œuvres complètes. Tome II, Page 1861.
Dans l’exemplaire CAMUS œuvre complète Tome II, page 1861, édition de 1965 cette note ne figure pas ?
Un camarade m’envoie une autre version du même livre. Et il me précise par mail : Il s’agit de la réédition de 2000 d’une édition originale de 1965 de « Albert Camus Essais ». Dont acte ! 40 ans après sa mort, Camus parle encore !!!
Cette phrase est citée également dans la même conférence de Guy Pervillé de 2012
La seconde [29] est une sorte de conclusion personnelle ajoutée par Roger Quilliot : « Dirai-je, pour finir, que Camus ne parvint jamais à se faire à l’idée d’indépendance de l’Algérie. La dernière fois que je le vis en 1959, après le discours sur l’autodétermination, il me dit : « (…) si l’Algérie devient indépendante, je quitterai la France. Je partirai au Canada ». La contradiction avec la lettre du 19 octobre 1959 citée par Philippe Vanney semble totale, mais sans doute faut-il comprendre que Camus évoquait devant Roger Quilliot l’hypothèse d’une victoire de la sécession.
Il s’agit donc d’une phrase dite par Camus dont se souvient Quilliot, plusieurs années plus tard.
Cette phrase isolée (et qui n’a pas dit une connerie à un moment ou à un autre de sa vie !) est en contradiction avec tout ce qu’écrit Camus.
Mais Cloag en fait ses choux gras !

Après les phrases tronquées, passons aux interprétations :
Page 45
Sa lecture du symbolisme des rats dans la peste roman écrit en 1941, est proprement dégueulasse. Les rats de la peste sont, d’après Olivier Cloag, les Algériens qui vont envahir Oran. Alors que tous les autres lecteurs y ont vu une allégorie de l’occupation allemande de la France. Non seulement cette interprétation est scandaleuse pour Camus mais elle l’est aussi pour les Algériens !

J’en profite pour signaler que France 2 a annoncé que le premier épisode de “La Peste” serait diffusé le lundi 4 mars à 21h10. La chaîne publique proposera les deux premiers épisodes ce soir-là. Réalisée par Antoine Garceau sur un scénario de Gilles Taurand et Georges-Marc Benamou, cette nouvelle mini-série en quatre épisodes s’inspire du célèbre livre éponyme écrit par Albert Camus.

Page 53
Cloag fait l’apologie de la violence révolutionnaire des colonisés. Il suit en cela la bonne lecture d’un Fanon ou d’un Sartre tandis que Camus, qui est fondamentalement contre la violence, qu’elle soit coloniale ou révolutionnaire écrit :
Chroniques Algériennes : Page 364 des œuvres complètes.
Telle est, sans doute, la loi de l’histoire. Quand l’opprimé prend les armes au nom de la justice, il fait un pas sur la terre de l’injustice (1°). Mais il peut avancer plus ou moins et, si telle est la loi de l’histoire, c’est en tout cas la loi de l’esprit que sans cesser de réclamer justice pour l’opprimé, il ne puisse l’approuver dans son injustice, au-delà de certaines limites. Les massacres des civils, outre qu’ils relancent les forces d’oppression, dépassent justement ces limites et il est urgent que tous le reconnaissent clairement. 1° (Argumentation reprise dans l’Homme révolté)

Mais on va trouver encore plus amusant :
Page 57 où Sartre devient résistant !
On parle bien du Sartre qui fait applaudir Les mouches  au théâtre de la Cité le 2 juin 1943 :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Mouches
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Paul_Sartre
« Je maintiens qu’en une vingtaine d’années consacrées à la recherche et à des travaux sur l’histoire de la Résistance en France, je n’ai jamais rencontré Sartre ou Beauvoir. »
Dit le journaliste résistant Henri Noguères à l’historien Gilbert Joseph :

Et Page 62 ou Camus devient un collabo des Allemands puisque défaitiste-pacifiste dès 1939. (Ce qui d’ailleurs était aussi le cas de Giono)
En 1943, il devient lecteur chez Gallimard, entre dans la Résistance et prend la direction de Combat.
Le journal se revendique comme la « voix de la France nouvelle » et Camus ne souhaite pas qu’il soit associé à un quelconque parti politique. En mai ; la résistance lui délivre une fausse carte d’identité sous le nom de Albert Mathé, lui donnant comme résidence rue de petit vaux à Epinay-sur-Orge. Son pseudonyme, dans la Résistance, était Bauchard.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Camus

Page 103
À propos du dernier livre d’Albert Camus, Le Premier Homme, et de la xénophobie des pieds-noirs :
Cette subordination n’est pas relevée de façon critique bien au contraire, elle est défendue comme excusable parce que humaine. Cette tentative de justification de la xénophobie renvoie une conception de l’humanité comme motivée par des atavismes purement identitaire.

Ce type n’a rien compris entre l’humain, le sensible et son « antiracisme ». Camus est le fils d’un temps et d’une société donnée. Il est déchiré entre un humanisme universel qui lui fait dénoncer toute sa vie ce que le colonialisme fait subir aux Algériens, et la peur qu’il ressent de ce qui va arriver aux Français d’Algérie.

C’est qu’il exprime dans son fameux :
« En ce moment, on lance des bombes dans les tramways d’Alger. Ma mère peut se trouver dans un de ces tramways. Si c’est cela la justice, je préfère ma mère. »
Lors de la remise du Nobel.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_d%27Alg%C3%A9rie

Page 105
Ce que Cloag décrit comme haine des anticolonialistes parisiens de la part de Camus :
Cette obsession contre les métropolitains indépendantistes, perçue comme une cinquième colonne, est une autre manière de minimiser le rôle des Algériens dans leur propre libération.
Alors que cette haine est le reflet de l’incompréhension des élites parisiennes pour le drame des pieds-noirs qui devaient s’exiler.
C’est vrai que je me dis que le racisme des pieds noirs aurait été difficilement intégrable dans une Algérie algérienne… mais leur souffrance m’est chère !

Page 106 :
Une citation (immonde) tirée du livre Le premier homme. Il s’agit d’un songe du personnage.
Il le rêve dans la sieste : demain, six cents millions de Jaunes, des milliards de Jaune, de Noirs, de basané, déferleraient sur le cap de l’Europe… Et au mieux la convertiraient. Alors tout ce qu’on avait appris, à lui et à tout ce qui lui ressemblaient, tout ce qu’il avait appris aussi, de ce jour les hommes de sa race, toutes les valeurs pourquoi il avait vécu mourraient d’inutilité..
Mais Cloag en tronque la dernière phrase :
Qu’est-ce qu’il faudrait encore alors ? Le silence de sa mère, il déposait ses armes devant elle.
Quand on sait qu’il s’agit d’un livre inachevé, retrouvé dans la voiture à l’état de carnets épars et dont rien ne prouve qu’il aurait voulu publier tel quel ! Il faut tout rechercher, tout relire, car ce torchon est d’une telle mauvaise foi qu’il triche partout !

Je ne vais pas continuer à rechercher si Camus était sexiste ou s’il n’a pas changé d’avis sur la peine de mort.

Tout cela est sans importance face au génie de certaines pages d’Albert Camus.
Je pense à Noces par exemple… Alors effectivement il n’y a pas d’Arabes dans l’Étranger ou dans La Peste. Kamel Daoud, en 2014, dans son roman Meursault contre-enquête, l’avait bien relevé avec finesse. Mais ces absences correspondent à une réalité urbaine de l’Algérie française. Ma mère me disait que, dans son enfance, elle ne rencontrait pratiquement jamais d’Arabes en dehors des femmes de ménage de la pension de jeunes filles où elle était enfermée. Elle n’a vraiment côtoyé des Algériens que pendant la guerre, en Italie, engagée dans la première armée française comme transmissioniste. (Monte-Cassino, le débarquement de Provence, Colmar…) Cela ne l’a pas empêché plus tard d’être pour l’indépendance de ce pays.

Finalement pourquoi cet universitaire, Monsieur Cloag, a-t-il écrit un pamphlet aussi mensonger ? Je pense qu’il s’agit d’une idéologie : les études décoloniales.
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tudes_d%C3%A9coloniales
C’est honorable de vouloir faire prendre conscience du traumatisme des colonisations.
La richesse des pays développés s’est construite sur cet esclavage, sur ce pillage, sur ces massacres des populations indigènes d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique du Sud. Les internationalistes, les communistes, les anarchistes ont toujours été aux côtés des peuples colonisés, des décoloniaux sans le savoir.
Mais aux États-Unis une forme très spécifique de la pensée décoloniale est apparue ces dernières années. Ce sont ces déboulonneurs de statues, qui n’ont rien connu de ces combats internationalistes et qui maintenant construisent les divisions entre les peuples, entre les genres, entre les sexes, au nom d’un droit à l’identité personnelle. C’est une forme de néototalitarisme tout à fait compatible avec le néolibéralisme et le capitalisme mondialisé.

2° Lire, relire, découvrir Camus

Pour Camus, pour son style, pour sa vérité, je voudrais juste placer ici un extrait de son dernier livre de Camus : le premier homme. Pages 73 et suivantes

« Le ragoût va brûler, attends. »
Elle s’était levée pour aller dans la cuisine et il avait pris sa place, regardant à son tour dans la rue inchangée depuis tant d’années, avec les mêmes magasins aux couleurs éteintes et écaillées par le soleil. Seul le buraliste en face avait remplacé par de longues lanières en matière plastique multicolores son rideau de petits roseaux creux dont Jacques entendait encore le bruit particulier, lorsqu’il le franchissait pour pénétrer dans l’exquise odeur de l’imprimé et du tabac et acheter L’Intrépide où il s’exaltait à des histoires d’honneur et de courage. La rue connaissait maintenant l’animation du dimanche matin. Les ouvriers, avec leurs chemises blanches fraîchement lavées et repassées, se dirigeaient en bavardant vers les trois ou quatre cafés qui sentaient l’ombre fraîche et l’anis. Des Arabes passaient, pauvres eux aussi mais proprement habillés, avec leurs femmes toujours voilées mais chaussées de souliers Louis XV. Parfois des familles entières d’Arabes passaient, ainsi endimanchées. L’une d’elles traînait trois enfants, dont l’un était déguisé en parachutiste. Et justement la patrouille de parachutistes repassait, détendus et apparemment indifférents. C’est au moment où Lucie Cormery entra dans la pièce que l’explosion retentit.
Elle semblait toute proche, énorme, n’en finissant plus de se prolonger en vibrations. Il semblait qu’on ne l’entendait plus depuis longtemps, et l’ampoule de la salle à manger vibrait encore au fond de la coquille de verre qui servait de lustre. Sa mère avait reculé au fond de la pièce, pâle, les yeux noirs pleins d’une frayeur qu’elle ne pouvait maîtriser, vacillant un peu. « C’est ici. C’est ici, disait-elle. — Non », dit Jacques, et il courait à la fenêtre. Des gens couraient, il ne savait où ; une famille arabe était entrée chez le mercier d’en face, pressant les enfants de rentrer, et le mercier les accueillait, fermait la porte en retirant le bec-de-cane et restait planté derrière la vitre à surveiller la rue. À ce moment, la patrouille de parachutistes revint, courant à perdre haleine dans l’autre sens. Des autos se rangeaient précipitamment le long des trottoirs et stoppaient. En quelques secondes, la rue s’était vidée. Mais, en se penchant, Jacques pouvait voir un grand mouvement de foule plus loin entre le cinéma Musset et l’arrêt du tramway. « Je vais aller voir », dit-il.
Au coin de la rue Prévost-Paradol, un groupe d’hommes vociférait. « Cette sale race », disait un petit ouvrier en tricot de corps dans la direction d’un Arabe collé dans une porte cochère près du café. Et il se dirigea vers lui. « Je n’ai rien fait, dit l’Arabe. — Vous êtes tous de mèche, bande d’enculés », et il se jeta vers lui. Les autres le retinrent. Jacques dit à l’Arabe : « Venez avec moi », et il entra avec lui dans le café qui maintenant était tenu par Jean, son ami d’enfance, le fils du coiffeur. Jean était là, le même, mais ridé, petit et mince, le visage chafouin et attentif. « Il n’a rien fait, dit Jacques. Fais-le entrer chez toi. » Jean regarda l’Arabe en essuyant son zinc. « Viens », dit-il, et ils disparurent dans le fond. En ressortant, l’ouvrier regardait Jacques de travers. « Il n’a rien fait, dit Jacques. — Il faut tous les tuer. — C’est ce qu’on dit dans la colère. Réfléchis. » L’autre haussa les épaules : « Va là-bas et tu parleras quand tu auras vu la bouillie. » Des timbres d’ambulances s’élevaient, rapides, pressants. Jacques courut jusqu’à l’arrêt du tram. La bombe avait explosé dans le poteau électrique qui se trouvait près de l’arrêt. Et il y avait beaucoup de gens qui attendaient le tramway, tous endimanchés. Le petit café qui se trouvait là était plein de hurlements dont on ne savait si c’était la colère et la souffrance.
Il s’était retourné vers sa mère. Elle était maintenant toute droite, toute blanche. « Assieds-toi », et il l’amena vers la chaise qui était tout près de la table. Il s’assit près d’elle, lui tenant les mains. « Deux fois cette semaine, dit-elle. J’ai peur de sortir. — Ce n’est rien, dit Jacques, ça va s’arrêter. — Oui », dit-elle. Elle le regardait d’un curieux air indécis, comme si elle était partagée entre la foi qu’elle avait dans l’intelligence de son fils et sa certitude que la vie tout entière était faite d’un malheur contre lequel on ne pouvait rien et qu’on pouvait seulement endurer. « Tu comprends, dit-elle, je suis vieille. Je ne peux plus courir. » Le sang revenait maintenant à ses joues. Au loin, on entendait des timbres d’ambulances, pressants, rapides. Mais elle ne les entendait pas. Elle respira profondément, se calma un peu plus et sourit à son fils de son beau sourire vaillant. Elle avait grandi, comme toute sa race, dans le danger, et le danger pouvait lui serrer le cœur, elle l’endurait comme le reste. C’était lui qui ne pouvait endurer ce visage pincé d’agonisante qu’elle avait eu soudain. « Viens avec moi en France », lui dit-il, mais elle secouait la tête avec une tristesse résolue : « Oh ! non, il fait froid là-bas. Maintenant je suis trop vieille. Je veux rester chez nous. »

Mais cela ne suffit pas ! Il me faut citer Camus, comme écrivain politique :

Chroniques Algériennes : LA BONNE CONSCIENCE
Si les Français d’Algérie cultivaient leurs préjugés, n’est-ce pas avec la bénédiction de la métropole ? Et le niveau de vie des Français, si insuffisant qu’il fût, n’aurait-il pas été moindre sans la misère de millions d’Arabes ? La France entière s’est engraissée de cette faim, voilà la vérité. Les seuls innocents sont ces jeunes gens que, précisément, on envoie au combat.

Chroniques Algériennes : TRÊVE POUR LES CIVILS
Je sais, il y a une priorité de la violence. La longue violence colonialiste explique celle de la rébellion. Mais cette justification ne peut s’appliquer qu’à la rébellion armée. Comment condamner les excès de la répression si l’on ignore ou l’on tait les débordements de la rébellion ? Et inversement, comment s’indigner des massacres des prisonniers français si l’on accepte que des Arabes soient fusillés sans jugement ? Chacun s’autorise du crime de l’autre pour aller plus avant. Mais à cette logique, il n’est pas d’autre terme qu’une interminable destruction. « Il faut choisir son camp », crient les repus de la haine ! Je l’ai choisi ! J’ai choisi mon pays, j’ai choisi l’AIgérie de la justice, où Français et Arabes s’associeront librement !

Chroniques Algériennes : LE PARTI DE LA TRÊVE
On me dit qu’une partie du mouvement arabe propose une forme d’indépendance qui signifierait, tôt ou tard, l’éviction des Français d’Algérie. Or, par leur nombre et l’ancienneté de leur implantation, ceux-ci constituent eux aussi un peuple, qui ne peut disposer de personne, mais dont on ne peut disposer non plus sans son assentiment.
Les éléments fanatiques de la colonisation, de leur côté, brisent les vitres au cri de « Répression », et renvoient après la victoire des réformes mal définies. Cela signifie pratiquement la suppression, au moins morale, d’une population arabe dont ni la personnalité ni les droits ne peuvent être niés. Ce sont là des doctrines de guerre totale. Ni dans un cas ni dans l’autre, on ne peut parler d’une solution constructive.
Et dans son discours pour une trêve civile qui demandait que d’un côté (l’armée française) comme de l’autre (Les fellaghas) on arrête de s’en prendre aux civils :
En ce qui me concerne, j’ai aimé avec passion cette terre où je suis né, j’y ai puisé tout ce que je suis, et je n’ai jamais séparé dans mon amitié aucun des hommes qui y vivent, de quelque race qu’ils soient.

Car enfin, ce grand poète a aussi essayé de faire cesser les massacres qui ont ponctué la guerre d’Algérie !
https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Appel_pour_une_Tr%C3%AAve_Civile

3° L’actualité d’Albert Camus

Armé de son humanisme universel, il a essayé de faire entendre raison à la barbarie des siens et des autres.
Camus, un libertaire, pacifiste, humain, anticolonialiste, avec toutes ses contradictions, a voulu une fédération entre l’Algérie et la France. Il a essayé jusqu’au bout d’enrayer la machine qui a séparé ces peuples qui auraient pu vivre ensemble, Arabes, Berbères, Juifs, Français, Espagnols, Maltais… Cette terre leur était commune.
Mais la naissance d’une Algérie indépendante s’est faite dans la haine, dans le sang et dans l’exil. Il aurait pu en être autrement.
Comment ne pas voir que cette situation épouvantable se reproduit en ce moment même en Palestine/Israël ? Où l’horreur intégrale du massacre du 7 octobre dernier puis les bombardements sur tout un peuple, enfermé dans un tout petit territoire et sans aucun moyen de fuir semble sans espoir.
Alors bien sûr c’est compliqué. L’histoire est compliquée.
Mais une terre commune pour des peuples qui ont tout pour vivre ensemble, c’est déjà le message de Camus, il a 65 ans !

Caillou. 22 février 2023

Bibliographie :
Bien sûr tout Camus et en particulier : Noces, L’étranger, La peste, le premier homme. Et tous les écrits politiques
Albert Camus de Danièle Boone, aux éditions Henry Veyrier – 1987
Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud paru en octobre 2013 et réédité en 2014 chez Actes Sud
Albert Camus, fils d’Alger de Vircondelet, 2010. Paris, Fayard, 2010. ISBN 9782213638447.
Albert Camus : une vie d’Olivier Todd, Gallimard, coll. « NRF Biographies » en 1996, 864 p. ISBN 9782070732388.
L’ombre d’un homme qui marche au soleil de Maïssa Bey (préf. Catherine Camus), : Chèvre-feuille étoilée, 2006. (ISBN 2914467370)
Albert Camus, Élisée Reclus et l’Algérie de Philippe Pelletier, : les « indigènes de l’univers », Le Cavalier bleu, 2015

Et l’excellent article de Lou Marin sur l’excellente revue Divergences
https://divergences.be/spip.php?article3519

Je me suis beaucoup servi de cette application en ligne:

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L’hommage à deux “Merlinettes”: Eugénie Djendi et Elisabeth Torlet

C’était le 6 octobre à Lorris dans le Loiret

La stèle avec son parachute

 

 

 

 

Avant la cérémonie
Christiane et Jean-Georges
La stèle découverte
Moi et une parachutiste porte-drapeaux

Les photos étaient interdites pendant la cérémonie pour une obscure raison de participations de soldats des forces spéciales…
Il faisait beau et je me sentais bizarre au milieu de tous ces uniformes et de ce cérémonial, mais c’était pour Madeleine.

Caillou le 4 novembre 2023

 

 

 

L’hommage (annulé) à deux “Merlinettes”: Eugénie Djendi et Elisabeth Torlet

Il devait y avoir un hommage à Eugénie Djendi et Élisabeth Torlet,
à l’occasion de l’inauguration d’une stèle, à Lorris, dans le Loiret,
au musée de la Résistance et de la Déportation.

On peut trouver un livre sur le parcours d’Eugénie Djendi,
cette jeune femme assassinée à Ravensbrück.

Mais cette inauguration a été annulée,  en raison des événements .
Faute de gendarmes disponibles car occupés par la révolte dans les banlieues.

Nous y sommes allés malgré tout et je me suis fait photographier, avec le portrait
de Madeleine,  ma mère, Merlinette elle aussi, devant la stèle recouverte d’un plastique.

Et nous avons visité le musée: Une exposition en hommage aux femmes résistantes.

Un mannequin pour représenter les transmissions dans le maquis.

Et une petite affiche montrant qu’elle était la place des femmes sous le régime de Vichy !

(…voir les billets sur les Merlinettes dans la catégorie “Mad”)
Caillou, le 4 juillet 2023

 

 

 

 

 

Oradour-sur-Glane en Algérie : Une mémoire oubliée…

Je viens de terminer la lecture du livre de Nedjib Sidi Moussa: “La fabrique du Musulman”.
Livre passionnant que je recommande particulièrement à tous les excitéEs “en lutte contre l’islamophobie” qui en oublient de dénoncer l’islamisme politique au point d’en devenir les idiots utiles.
Sur son site https://sinedjib.com
j’ai trouvé une référence passionnante à une mémoire oubliée, celles des opposants au colonialisme français qui, dès aout 1945, dénoncèrent les massacres de Setif et Guelma.
Le 8 mai cela fait 77 ans.
Merci à Nedjib et à l’association RADAR http://www.association-radar.org qui témoigne de cette mémoire…
Ohé Partisans c’est un journal du Parti communiste Internationaliste, donc un groupe de trotskystes antifascistes… Le texte est en dessous.

PLUTÔT MOURIR DEBOUT QUE DE VIVRE À GENOUX
Oradour-sur-Glane en Algérie
La vérité sur le drame d’Afrique du Nord

Une censure sournoise et une presse bien sage : voilà pourquoi si peu de gens ont une idée précise des événements qui ont ensanglanté l’Algérie.
La situation
Les populations d’Afrique du Nord n’ont jamais connu les bienfaits de la colonisation ».
La richesse des gros colons, et des industriels a été faite de la sueur et du sang des esclaves coloniaux. Depuis la guerre, une famine effroyable a augmenté terriblement la mortalité. En Algérie, les deux tiers des enfants indigènes meurent avant l’âge de deux ans. Dans certaines régions, les Algériens ont pour toute nourriture 120 grammes de grain par jour. Des milliers d’Arabes vivent dans des loques et à peu près nus. Multipliez par dix les restrictions que nous connaissons ici, et par vingt la pourriture vichyssoise : vous avez la situation en Afrique du Nord. La colère des masses en est multipliée d’autant.
Les partis algériens
Par leur politique de soutien du gouvernement, les Partis Ouvriers français ont perdu une grande partie de leur influence. Les Algériens réalisent nettement que les paroles du P. S. et du P. C. F. contre les gros colons ne sont que de la démagogie. Il est évident que les colons ne pourraient exploiter longtemps le peuple algérien s’ils n’avaient pour les soutenir, les baïonnettes du gouvernement « démocratique » auquel participent le P. S. et le P. C. F.
Ce sont donc les Partis Nationalistes Algériens qui bénéficient de la confiance des masses populaires.
Le Parti du Peuple Algérien (P. P. A.) qu’une certaine presse hypocrite a tenté de confondre avec le P. P. F. Inutile de dire qu’il n’y a rien de commun.
Le chef du P. P. A. : Messali Hadj, fut emprisonné sous le gouvernement de Daladier puis sous celui de Pétain et enfin sous le gouvernement actuel. Le deuxième parti est « le mouvement des amis du manifeste », de Ferrat Abbas. Devant la poussée des masses laborieuses, la bourgeoisie ne pouvait freiner le mouvement par des appels au calme de chefs ouvriers traîtres (à la mode de chez nous), ces derniers n’ayant plus de crédit en Algérie. Pour briser les reins au mouvement d’émancipation, elle prépara une monstrueuse provocation. La préparation du massacre fut l’œuvre des colons fascistes et de l’administration algérienne. (Cela, toute la presse de gauche l’a reconnu en France.) Mais la complicité du gouvernement (sur laquelle la presse se tait) ressort des faits qui suivent.
Le drame
Le 8 mai, le drame éclate à Sétif. Une manifestation indigène avait lieu. Une foule de plusieurs milliers de Nord-Africains défilent avec des banderoles : « Vive l’Algérie Indépendante » ! « Libérez Messali Hadj » !
La police intervient. La foule refuse de retirer les mots d’ordre. Un commissaire de police sort son revolver et tire sur les manifestants. Plusieurs s’écroulent ; la foule se disperse. Alors, un groupe d’indigènes parcourt la ville en tuant un certain nombre de personnes.
En tout, 102 morts, d’après les chiffres officiels.
Le prétexte est fourni à une répression sauvage et l’État français se garde bien naturellement d’inquiéter les fomentateurs de la provocation. (Suite page 8.)
Au contraire, la répression est organisée contre la population indigène. Les Versaillais ont fait des petits ! La loi martiale est décrétée à Sétif. Il est interdit aux indigènes de sortir de chez eux s’ils ne sont pas munis d’un brassard spécial indiquant qu’ils se rendent au travail. Tout musulman vu sans brassard est tué sans avertissement.
En pleine ville de Sétif, dans un square, un gamin qui cueillait des fleurs est tué par un sergent. Dans la région de Sétif, la répression est faite par la Légion étrangère et les Sénégalais qui massacrent, violent, pillent les demeures des indigènes et incendient.
La marine dépêche le Duguay-Trouin de Bône. Il bombarde les environs de Kerrata. M. Tillon a demandé aux ouvriers de travailler à construire une forte aviation. Fort bien, les fascistes algériens savent utiliser cette aviation pour semer la mort dans les villages indigènes. Elle bombarde et mitraille toute la région au Nord de Sétif qui est aujourd’hui partiellement un désert (presse démocrate d’Algérie).
Le massacre atteint son comble.
A Guelma. La presse pétainiste a fait du beau travail et suscité une véritable folie raciste dans la population européenne, à telle point que la répression est dirigée par des éléments de la France Combattante et même du Parti Communiste local !
Le II et le 12 mai, selon l’aveu du sous-préfet Achiary, les officiers français font fusiller 300 (trois cent) jeunes musulmans (6 à 600 selon d’autres témoignages) … Les voilà bien les officiers vichystes (qui ne demandaient qu’à se racheter)
Partout le carnage continue, et à Taher, à la sortie d’une conférence faite par M. Lestrade-Carbonel, préfet de Constantine, plusieurs Vichystes notoires peuvent dire : (c’est un jour de victoire pour nous !), En effet.
En France, les gardes civiques du peuple n’existent plus, mais en Afrique du Nord la réaction constitue une « Garde civique » à elle, dans laquelle ce sont les anciens membres du S.O.I de Darnand qui occupent les principaux postes de commandement.
Des militants communistes qui s’étaient élevés contre la tuerie sont frappés par des naphtalineux. Certains militants disparaissent même mystérieusement.
A Djidjelli, les 9, 10 et 11 mai, l’armée pille les quartiers indigènes. La fédération des syndicats confédérés proteste et demande à être reçue par le préfet qui refuse en répondant à la manière de Goering : « L’armée fait son devoir » !
La manœuvre classique
Bien entendu, la réaction essaie de brouiller les cartes selon le procédé classique. Elle déclare que c’est la main de l’Allemagne qui est derrière tout cela.
C’est là un procédé qui prend avec les niais qui oublient que c’est le capital qui a fait Hitler et non Hitler qui a fait le capitalisme.
A la mairie de Douera, lors d’une réunion des maires du Sahel, un certain M. Dromigny applaudit le nom du Général de Gaulle, puis fait une diatribe contre la « propagande allemande » … et enfin réclame le maintien de la Loi Martiale et de la répression contre les indigènes.
Or, ce M. Dromigny était, avant-guerre le représentant en Algérie du Fasciste Dorgères !
Bilan de la répression
« Quelques centaines de victimes »
C’est faux !
Alors M. Tixier-Stulpnagel lâche du lest…
« Douze cents Algériens tués »
C’est faux I
Les culottes de peau chargées de la répression avouent huit mille morts !
Le consul américain d’Alger déclare 35.000 victimes indigènes.
« L’ordre règne en Algérie « !
Sur les Champs-Élysées, la foule applaudit les SS de la Légion en képi blanc. (Ce sont de vrais soldats, ma chère). Comme tout devient clair dans le « problème allemand » …
Et là-bas dans les ruines d’un village, un vieil Arabe parle à ses enfants du « peuple des Seigneurs »
Nous ressentons une grande honte en songeant à cela, nous qui avons lutté pendant quatre ans contre l’oppression. Non ! camarades algériens, nous ne voulons pas être complices du gouvernement bourgeois et de ses tueurs !
Vive la lutte du peuple algérien pour son indépendance !
Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !

Caillou le 14 mai 2021

18 Avril 2021 : Hommage aux insurgé.e.s du Ghetto de Varsovie

Hommage aux insurgé.e.s du Ghetto de Varsovie
18 avril 2021, 14h, Place de l’hotel de ville, Paris

Lorsque les nazis entrent dans le ghetto de Varsovie le 19 Avril 1943, ils ne s’attendent pas a trouver 750 juifs et juives armé·es derrière des barricades, prêt·s à les combattre.
Enfermé·es et tassé·es entre des murs aveugles depuis novembre 1940, la population du Ghetto a déjà chuté de 450 000 à 70 000 personnes en moins de 3 ans, en raison des déportations quotidiennes vers le camp de mise à mort de Treblinka.
La date de l’attaque choisie par les nazis correspondait cyniquement avec le premier jour de Pessah (Pâques juive), célébration de la liberté par le souvenir de la sortie d’Égypte du peuple hébreu.
Les insurgé·es n’ont pas de doute sur ce qui les attend comme le montre l’écrit d’un combattant du ghetto : « Nous ne voulons pas sauver notre vie. Personne ne sortira vivant d’ici. Nous voulons sauver la dignité humaine ».
L’organisation juive de combat (OJC/ en polonais ZOB) – initiée par les mouvements de jeunesse présents dans le Ghetto dont les figures les plus connues étaient Mordehaï Anielewicz, Mira Fuchrer et Marek Edelman – planifie et organise l’insurrection du ghetto.
Ce combat inclut également l’installation de caches et d’abris, la fabrication des armes, des barricades, le stock des provisions et la cuisine, le soin des blessé·es, et la communication. C’est tout le ghetto de Varsovie qui s’est soulevé et a soutenu les 750 combattant·es. Malgré les conditions dramatiques de leur lutte, les milliers de personnes acculées se sont dressées et organisées contre les nazis. Ces femmes et ces hommes se sont aussi battu·e·s pour que leur mémoire nous parvienne et nous inspire. Leur rendre hommage est également un appel aux combats d’aujourd’hui face à la montée des droites extrêmes et des idées fascisantes, et plus particulièrement de l’antisémitisme.
Comme l’écrivait Mordehaï Anilewicz dans son dernier message du 23 avril 1943 : « Grâce à notre radio, nous avons entendu une merveilleuse émission relatant notre lutte. Le fait que l’on parle de nous hors du ghetto nous donne du courage.”
A toutes et à tous les insurgé·es du ghetto, nous rendrons hommage le 18 Avril 2021 à 14h.
A l’appel du Réseau d’Actions contre l’Antisémitisme et tous les Racismes (RAAR).

Un séminaire en ligne avec l’historienne Audrey Kichelewski sur le soulèvement du Ghetto de Varsovie et ses mémoires
19 avril 2021, 19h30
Ce séminaire, qui se déroulera sur ZOOM, est ouvert à tou.te.s !
Vous pouvez dès maintenant vous inscrire à cette adresse :
raar-ghetto-varsovie-2021@gmail.com

On peut voir, sur le site de l’INA, Anna Langfus témoigner sur ce premier jour de l’insurrection .
Ici:
C’est un extrait du journal télévisé de 1965.
Cela dure très peu, 3 min 52 s.
Pour moi, entendre cette voix amie, disparue depuis 1966, me touche au cœur.
Salut Anna et merci à l’INA.


Caillou,  le 17 avril 2021.

Une mémoire perdue

Comment expliquer que l’histoire des Merlinettes soit si peu connue ?

Que d’efforts pour arriver à une commémoration discrète, à une inauguration… Et ce alors que les derniers témoins disparaissent.

J’ai trouvé dans le livre de Dominique Camusso et Marie Antoinette Arrio une belle explication que le parcours très particulier d’Eugénie Djendi illustre parfaitement. Avec l’autorisation des auteurs, je me permets de citer totalement les
4 pages suivantes.
En les remerciant

Caillou le 20 Juillet 202

inauguration du square Eugénie Djendi à Paris en 2015. Photo Geneviève Zamansky-Bonin.

Une mémoire perdue

Nous venons de parcourir la vie d’Eugénie Djendi. Une vie exceptionnelle au sens premier du terme. Il n’y a sans doute pas plus d’une vingtaine de femmes qui ont accompli les mêmes choses pour en définitive connaître le même sort. Mais, une fois sa famille disparue, le témoin n’a pas été transmis pour que se poursuive le parcours de mémoire. Cela tient à ce que la personne d’Eugénie Djendi avec ses actes et ses engagements n’est pas entrée en résonance avec les catégories mémorielles qui ont émergé après guerre.
Les premières catégories auxquelles on peut penser sont des catégories renvoyant à ses origines. Célébrer une Corse héroïque du fait de sa famille maternelle ? Difficile à imaginer d’autant plus qu’elle n’a pas dû séjourner dans l’île au-delà de périodes de congés. Sa grand-mère s’est occupée discrètement du souvenir de sa petite-fille tant qu’elle a vécu, mais ensuite sa mère a liquidé tous ses biens en Corse. Une Arabe valeureuse ? Comme cela a été tenté en juillet 1958, mais on a préféré mobiliser la religion musulmane à laquelle elle n’appartenait pas. Une actuelle identité algérienne ne ferait guère de sens Pour une personne qui ne connut que l’Algérie colonisée. Le concept méditerranéen, s’il avait été en vigueur à l’époque, aurait pu être mobilisé pour faire ressortir son métissage. Mais à ce moment la mer était perçue comme une frontière qui sépare en renvoie l’autre à ses origines, plutôt que comme un point commun autour duquel on se rassemble. Là encore, les événements de juillet 1958 sont symptomatiques. Quand « la Dépêche de Constantine » parle de la communauté franco-musulmane, les autorités n’envisagent pas la population marchant ensemble, mélangée, sur un chemin allant dans une même direction, mais chacun sur son trottoir, Eugénie et sa famille paternelle étant renvoyée sur le trottoir «musulman».
Si Eugénie Djendi n’a pas d’origines familiales suffisamment tranchées auxquelles la rattacher, son engagement au service de la nation pourrait la renvoyer à une mémoire militaire.
Malheureusement, son statut de personnel «féminin» de l’armée introduit immédiatement une ambiguïté voire une exclusion. Femme, elle n’a pas signé un engagement comme les hommes. Quand on lit les courriers du général Merlin pour défendre ses ouailles lors de la création du corps des AFAT on perçoit bien que les femmes restent des militaires d’un ordre subalterne. Et cette position tient beaucoup plus aux autorités responsables, y compris féminines, de ce nouveau corps de personnel, qu’aux officiers qui ont eu à commander des femmes. Cette prévention s’est certainement propagée dans certaines instances d’anciens combattants dont on pourrait pourtant penser qu’ils étaient sensibles à la mémoire et à la commémoration de leurs anciens. Aucune inscription du nom d’Eugénie Djendi n’a été faite sur un monument aux morts. Pourtant un projet avait été initié à Ucciani dans son village d’origine. Il semble que les groupes d’anciens combattants locaux n’aient, pour le moins, pas donné suite, laissant même le soin de l’entretien de la tombe où est apposée la plaque mémorielle au bon vouloir des voisins une fois la grand-mère décédée. Toutes les institutions militaires ne sont pas identiques. L’arme des Transmissions a fait un geste à usage interne en inscrivant son nom sur la plaque .de la caserne du Mont-Valérien. Mais seuls ceux qui y ont accès le savent et ils ne sont pas nombreux. En fait, parmi les organisations militaires seuls les Services Spéciaux ont fait. preuve de fidélité et de reconnaissance en inscrivant son nom sur le monument de Ramatuelle. On peut certainement voir en cela la volonté personnelle de Paul Paillole comme celle de Lucien Merlin qui n’a jamais manqué de rappeler le souvenir de ses quatre merlinettes dans tous ces textes et conférences tenues après guerre. Malheureusement, les services secrets ne sont pas les meilleurs vecteurs pour faire connaître au grand public des parcours individuels souvent atypiques.
Puisque la mémoire d’Eugénie Djendi n’arrive pas à trouver place dans les catégories précédentes peut-être la trouverait-elle mieux dans celles issues de la Résistance. Si l’on prend pour guide la structuration du « mythe de Résistance » que propose Gildea, il semble normal qu’elle ne s’insère pas mieux dans le récit gaulliste, national, militaire et masculin qui prédomine dès la sortie de la Guerre. « La résistance s ‘est mise en place dès le début de la guerre derrière le général de Gaulle à Londres, tandis qu’une poignée d’égarés collaboraient avec l’ennemi, une minorité de résistants actifs soutenue par la majorité des Français libéraient la France soutenus militairement par quelques étrangers ». Elle ne peut trouver sa place dans ce récit, elle n’appartient à aucune de ces catégories. En juin 1940, elle n’a que 17 ans et elle vit en Afrique du Nord. Elle ne croisera la route gaulliste que quand le général viendra à Alger. Mais à ce moment, ses engagements sont pris. La Résistance de l’intérieur qui libère son pays ne peut la concerner non plus à moins de donner au concept d’intérieur une dimension purement patriotique. Dans ce récit appartiendrait-elle à l’aide minoritaire venue de l’étranger ? Sûrement pas à la majorité passive e encore moins aux égarés. Non, elle n’est pas un personnage de ce récit. Elle ne l’est pas non plus de la geste communiste qui prend corps en opposition à la précédente lorsque le parti quitte les sphères du pouvoir.
Venant d’Algérie son souvenir collectif ne pouvait pas non plus résister aux fractures qu’occasionnera la Guerre d’Algérie et à la mise à mal du mythe résistant par le comportement d’ancien héros, de militaires en particulier. On se limitera, pour rester avec des noms que l’on a croisés, à penser au général Juin placé entre deux chaises et au général de Larminat qui préfère le suicide au choix entre les loyautés qui lui sera imposé.
A partir des années 80, la mémoire militaire nationale et masculine de la Résistance bascule vers celle du génocide des juifs et d’autres minorités et à la commémoration de leurs sauveteurs. Eugénie Djendi n’a aucune place à prendre dans cette partie de l’Histoire.
Le souvenir et l’entretien de la mémoire des déportés et des exactions dans les camps de concentration auraient aussi pu être une occasion pour que la figure d’Eugénie Djendi soit maintenue vivante. Il n’en a rien été ou si peu. Militaires dans un camp de déportées politiques Marie-Louise Cloarec, Eugénie Djendi, Pierrette Louin et Suzanne Mertzisen n’étaient, comme elles le pensaient d’ailleurs, pas à leur place. Au-delà du partage des souffrances et du martyr, leurs codétenues savaient-elles vraiment qui elles étaient et ce qui les avait conduites à Ravensbrück. Il est révélateur de noter à ce sujet qu’il n’est jamais fait référence à leur statut militaire, et encore moins d’agent du contre-espionnage. Elles sont les « quatre petites parachutistes » dans le texte de Germaine Tillion de 1946 et sont encore « les parachutistes » dans la revue « Voix et visages » de janvier 1986. Quarante ans plus tard, leur identité de déportées se résume à leur mode de transport pour venir en France.
Dans tous ces méandres, accaparements, récits et mythes, le souvenir d’Eugénie Djendi n’a pas trouvé sa place ni son chemin. Ceci d’autant plus qu’il n’y avait pas, ou peu, de famille qui connaisse suffisamment bien les faits pour s’en préoccuper. Si nous souhaitons que le souvenir d’Eugénie Djendi, son parcours, son engagement et son martyr restent présents dans les mémoires il ne faut pas compter sur son inscription dans une mémoire collective. La solitude inhérente à son engagement dans les services spéciaux nous oblige à nous souvenir d’elle uniquement comme la personne qu’elle fut dans sa singularité indépendamment des identités multiples et successives qui la constituent, mais ne la résument pas

 

La vie brisée d’une Merlinette

Un livre, qui vient d’être publié, retrace la vie d’une de ces volontaires féminines des transmissions, les Merlinettes, dont ce blog a longtemps recherché les traces.
L’histoire de la Seconde Guerre mondiale évoque très peu les femmes.
Ma mère, Madeleine, s’était engagée à Alger en 1943
pour libérer la France et contre le nazisme.  Elle en est revenue, vivante.
Mais c’est avec beaucoup d’émotion que je découvre ce livre
qui évoque une Merlinette massacrée à Ravensbrück.
Merci aux auteurs.
Caillou, le 13 juin 2020

ISBN: 978-2-343-19952-8

 

Ce livre est le récit d’un destin singulier et d’un engagement particulier dans la Seconde Guerre mondiale et la Résistance.
Eugénie Djendi est née à Bône (Algérie) en 1923. Engagée parmi les premières dans le Corps Féminin des Transmissions à Alger en janvier 1943, elle participe à la Campagne de Tunisie.
Repérée par les Services de la Sécurité Militaire, ils la recrutent en septembre 1943 comme agent du contre-espionnage au sein du réseau des « Travaux Ruraux ». Transférée en Angleterre après avoir été formée en Algérie, elle est parachutée en France en avril 1944. Son opération de parachutage ayant été trahie, elle est immédiatement arrêtée par les Allemands. Déportée vers Ravensbrück le 11 août 1944, elle y est assassinée d’une balle dans la nuque le 18 janvier 1945.
Elle n’avait pas 22 ans.

Un destin singulier qui n’a pas, ou si peu, laissé de traces. Un bel exemple de ces parcours discrets pourtant au cœur de l’Histoire.

Dominique CAMUSSO est titulaire d’un DEA de sciences humaines. Il se consacre actuellement  à la rédaction de parcours biographiques au cours des conflits du XXe siècle.
Marie-Antoinette ARRIO, titulaire d’une maîtrise d’histoire moderne. Elle cherche à conserver  vivante la mémoire  des combattants corses de la Seconde Guerre mondiale.

Malek Bensmaïl met gratuitement en ligne 10 de ses films

M. KALI

Malek Bensmaïl, le plus prolifique documentariste algérien, auteur de documentaires de création primés en de nombreux festivals, a mis en ligne dix de ses longs métrages.
Ils sont visibles jusqu’à fin avril gratuitement pour le grand bonheur des cinéphiles comme pour les moins accros de façon que leur confinement soit cinématographique dans un pays où le 7e art a été éradiqué.
Pour accéder à ces œuvres, il suffit de s’inscrire sur vimeo avec son adresse e-mail ou son compte Facebook, puis cliquer sur Regarder ou mdp promotionnel : confinement.
Les films sont dans les deux versions en sous titrage français et anglais. Il s’agit de :
La Chine est encore loin (2010-120’) https://vimeo.com/r/2z4q/ek16OG1pZ2,
Aliénations (2003-1h45’) https://vimeo.com/r/2z4A/ek16OG1pZ2,
Le Grand Jeu (2004-90’), https://vimeo.com/r/2z4G/ek16OG1pZ2,
Contre-Pouvoirs (2015-97’) https://vimeo.com/r/2z4M/ek16OG1pZ2,
Algérie(s) – Partie 1 (2002-2×80’) https://vimeo.com/r/2z4C/ek16OG1pZ2,
Algérie(s) – Partie 2 https://vimeo.com/r/2z4B/ek16OG1pZ2,
Boudiaf, un espoir assassiné (1999-60’) https://vimeo.com/r/2z4u/ek16OG1pZ2,
DéciBled (1998-55’) https://vimeo.com/r/2z4v/ek16OG1pZ2,
Des vacances malgré tout…(2000-70’’) https://vimeo.com/r/2z4x/ek16OG1pZ2,
DêmoKratia (court-métrage fiction-19’), https://vimeo.com/r/2z4I/ek16OG1pZ2,
Territoire(s) (1996-28’) https://vimeo.com/r/2z4K/ek16OG1pZ2

Merci !  C’est super. Nous allons regarder tout ça.
Caillou, pour Coup de Soleil Midi-Pyrénées

Une porcherie industrielle sur un lieu de mémoire !

Samedi 7 mars 2020, dans le Tarn et Garonne à la gare de Borredon.

En 1939, c’est là que discrètement, loin des villages où les autorités pouvaient craindre l’émotion des voisins, l’Etat français déversait les soldats vaincus de la République Espagnole: pour désengorger les camps du Roussillon, Argelès, St-Cyprien, Le Barcarès, Rivesaltes, et pour les enfermer derrière les grillages du Camp de Jude à Septfonds.

Pour beaucoup ce fut l’antichambre du  camp de concentration nazi de Mauthausen.

 

 

 

 

 

Nous faisons le chemin que ces prisonniers devaient emprunter, sous bonne garde, pour rejoindre le camp.

Une petite troupe marche dans la campagne. Un drapeau catalan…

Le temps est changeant. Presque froid et venteux et puis parfois des éclaircies et un soleil qui réchauffe. Alors on se regroupe, on chante.

Le drapeau de la République espagnole.

Et on repart.

Mais pour moi le cœur n’y est pas. Je m’attendais à une grosse mobilisation. A une arrivée massive de gens indignés par l’insulte faite à la mémoire des camps d’internement. Et nous ne sommes pas très nombreux. Une grande partie venue d’Espagne, des Asturies, de Madrid, de Catalogne et d’autres de plus près. Mais qu’un industriel veuille répandre des tonnes de lisier de cochon juste en face d’un mémorial ne semble pas soulever une colère locale. Triste époque!

Au fond de la prairie les bâtiments de la porcherie industrielle de 10 000 cochons sont déjà construits. Devant, sur cette étendue verte où se trouvait le camp de Septfonds en 1939, vont s’étendre les tonnes de lisier.

Sur une petite colline, voilà tout ce qui reste pour la mémoire. Un monument, des panneaux d’explications, quelques photos.  

 

Vient le temps des discours…

Vient le temps de la colère et de la honte.

Cela peut paraître de l’Histoire mais ce qui se passe en ce moment avec les migrants aux portes de l’Europe et des Etats-Unis relève de la même colère et de la même honte. Les puissants, qui nous dirigent, préfèrent toujours l’Économie (le lisier de porc) aux valeurs d’humanité dont pourtant ils se gargarisent.

 

Caillou, le 10 mars 2020

d’autres images, ici:

RESPECTER L’HISTOIRE : marche pour la dignité, de Borredon à Septfonds (galerie Louis Obis)

RESPECTER L’HISTOIRE : Marche de la gare de Borredon au camp de concentration de Septfonds (galerie Christian Morales)

Algérie : L’artiste-peintre et bédéiste algérien Nime arrêté pour des caricatures politiques.

Le silence des médias français sur ce qui se passe en Algérie en ce moment est assourdissant. Pourtant le mouvement (HIRAK) continue, tous les vendredis, et les arrestations se multiplient.

NIME est un artiste et un brillant manager d’une célèbre agence de communication dans la wilaya d’Oran.
Mardi après-midi, des éléments des services de sécurité ont débarqué dans son bureau et saisi tout son matériel informatique.
Durant son interrogatoire, son facebook a été ouvert et son smartphone décortiqué.
Les services ont tenté de savoir quels étaient ses accointances politiques comme si le désir de liberté était un crime puni par la loi.
Il lui est reproché d’avoir croqué quelques personnalités influentes de la junte militaire et politique qui ont spolié les Algériens de leur soif de démocratie.
 Il sera présenté aujourd’hui au procureur.
NIME EST INNOCENT DE VOS INDIGNITÉS,
 IL EST UN ARTISTE TALENTUEUX,
 IL EST UN ESPRIT LIBRE D’ALGERIE !LIBÉREZ NIME,
 LIBÉREZ LES DÉTENUS POLITIQUES,
ILS SONT LA DIGNITÉ DE L’ALGERIE !

Selon le Comité National pour la Libération des Détenus (CNLD),
l’artiste Abdelhamid Amine a été arrêté le 26 novembre 2019 
dans les locaux de son agence de publicité et son matériel a été saisi.
Il a été présenté ce jeudi 28 novembre devant le procureur du tribunal de la Cité Djamel d’Oran 
et a été placé en détention provisoire.
Les charges retenues contre lui seront précisées lors de l’audition du 5 décembre prochain.
Toujours selon le CNLD, son arrestation serait relative à la publication d’œuvres de caricature politique 
dont celle ci-dessous publiée le 3 novembre, intitulée « L’élu ». 
Évoquant le roman « Cendrillon », elle représentant les cinq candidats à l’élection présidentielle prévue le 19 décembre 2019 
et le Chef d’Etat-Major Ahmed Gaïd Salah chaussant Abdelmajid Tebboune, 
l’un des candidats à l’élection. En arrière-plan, on aperçoit la silhouette du président sortant, Abdelaziz Bouteflika.

Cartooning for Peace suit de près la situation de l’artiste et attend l’audience du 5 décembre pour connaître la raison de son incarcération et pour connaître les charges qui sont retenues contre l’artiste.