Magali, Joy, Sofia , Ludo…
Prostitué·es, sans-abri, migrant·es… Dans la rue, les situations d’extrême précarité sont encore accrues par la crise sanitaire.
Il faut d’urgence lutter contre les violences sexuelles et sexistes et obtenir de l’État trois garanties « droits et dignité ».
Le réseau Zéromacho cosigne cette lettre ouverte adressée à Emmanuel Macron, Président de la République, Edouard Philippe, Premier Ministre, et Marlène Schiappa, Secrétaire d’État à l’Égalité Femmes-Hommes.
Ce texte, initiative du Mouvement du Nid, est cosigné par les associations membres, comme Zéromacho, du collectif Abolition 2012.
Tous les articles par Caillou
Le chouchen
Il y a une bonne cinquantaine d’années, j’allais souvent dans un restaurant breton qui se trouvait derrière la gare Montparnasse, dans le 14èmearrondissement, à Paris. Nous étions toute une bande. Certaines faisaient du Vo-Vietnam1, un sport de combat, pour pouvoir se défendre contre les fascistes d’Ordre Nouveau. Je crois que la salle de sport était dans le quartier.
J’ai perdu de vue la plupart de mes camarades de l’époque. Déménagements, éloignements, ruptures, replis… Certains sont morts, d’autres m’ont déçu et on ne se parle plus depuis longtemps. Peu importe, c’était une bande de potes, garçons et filles, et dans mon souvenir c’est la bande qui me reste, plus que les membres qui la composaient.
Je me souviens qu’on chantait des couplets de La belle Hélène2 à pleine voix dans les rues en sortant des bars, avant de se séparer pour prendre les derniers métros. Nous étions beaux et minces, sobres et militants (pas tous), mais aussi pleins d’envies, pleins de vie, et pas toujours sérieux. Il faut mettre tout cela au féminin, bien sûr. Elles étaient aussi nombreuses que les garçons.
Bref, assez de nostalgie désuète, revenons à ce restaurant populaire où
j’ai bu pour la première et dernière fois du chouchen3.
Je n’avais pas de chien
Je n’aimais pas le chou4
C’était chouette chez Laurette5
Chouchou6 c’était le nom d’un personnage de Salut les Copains dont on ne voyait pas les yeux.
Et puis, toute cette période est partie dans la charrette du temps qui passe et ce n’est plus qu’un vieux chiffon sale dans mon cerveau-grenier.
Mais quel rapport, me direz-vous, entre tous ces mots si disparates ? C’est qu’ils se bousculent en courant pour aller se réfugier dans un vieux restaurant de prolétaires bretons du 14ème, quelque part derrière la gare Montparnasse.
Allez savoir pourquoi ?
1° http://vo-vietnam.org
2° De Jacques Offenbach
3° Une sorte d’hydromel bien sirupeux
4° Fleur, surtout en béchamel !
5° C’est ce que chantait Michel Delpech quelques années plus tôt.
6° Chouchou

Ce texte est écrit avec une contrainte de 6 mots, donnés par Gaby:
Chou, Chien, Chouette, Chouchou, Charrette, Chiffon
Vous pouvez m’en envoyer 6 autres.
Caillou, le 22 avril 2020.
Et le texte d’Annick avec les mêmes mots:
Chouchou viens
Pas toi le chien
La charrette passe regarde
Pas si près, on va nous voir
ils ont embarqué le voisin chouchou
ah ben j’ui avais bien dit chouchette
Si tu dénonces comme ça tes voisins
Ca va mal finir
Regarde regarde…
il a pas de masque
Qu’est ce qu’on mange à midi
des choux raves cuit au torchon chouchou
Chouette chouchette
Dans un western virtuel.
Un vent très chaud sur la sierra fait rouler les buissons de foin.
Whooo whooo whooo
Une poule s’échappe en caquetant, sur la rue endormie du bourg.
Cattt Cattt Cattt
Arrive alors le beau Pedro, armé de colts et sombrero.
Il marche au milieu de la rue et ses éperons font Cling Cling
Les volets claquent : Bing Blang, Bling Bling.
C’est le retour du grand lourd. Ils se terrent les habitants.
Et lorsqu’il ouvre les battants du saloon rouge de Claudine
Chlank, Chlank
Les 2 habitués le regardent. Les chaises raclent sur le plancher.
Reeee, Reeee
La patron moustachu se baisse pour attraper sa winchester
Les deux vieux filent à l’arrière.
Mais Claudine souveraine descend le grand escalier de fer
Elle est belle comme un ouragan.
Pedro demande un verre de bière
Silence et soulagement !
Sous l’effet de la brise sèche, on entend le lustre qui vibre
C’est du cristal. Diling Diling. Le patron pose son calibre.
Le beau Pedro qui a 8 ans embrasse la chanteuse aux rubans.
Dans ce jeu, c’est un vieux pépère qui s’embête et joue à l’écran.
Ce texte est écrit avec une contrainte de 6 mots, donnés par Claudine:
Chaud, brise, cristal, dormir, poule et lourd.
Vous pouvez m’en envoyer 6 autres.
Caillou, le 21 avril 2020.
Et le texte d’Annick, en réponse, avec les mêmes mots:
DORMIR comme une poule sur une patte
d’un sommeil lourd et accablant
des nuits agitées peuplées de
spectres verts et rouges aux reflets de cristal
tailladent chaque rêve en une multitude de tessons
qui finiront à la poubelle
ramassée dans la douce brise du matin
par des mains gantées de plastique
et des visages voilés plein de solitude et de colère.
Voyage voyage
Le poste radio dans la cuisine chante à pleins poumons.
Mais les transistors n’ont pas de poumons ! Pourquoi suis-je si préoccupé
par les poumons ce matin tandis que je beurre, solitaire, ma biscotte.
Voyage voyage
Plus loin que la nuit et le jour (voyage
voyage)
Dans l´espace inouï de l´amour
J’ai l’air fin avec ma biscotte beurrée dans l’espace inouï de l’amour à onze heures du matin dans ma robe de chambre pleine de cheveux ! Plus de pain, presque plus de beurre et plus du tout de confiture. Mon confinement, c’est l’hibernation de l’ours des montagnes ! Avec l’odeur…
Voyage voyage
Plus loin que la nuit et le jour (voyage
voyage)
Ah oui, là c’est sûr ! La nuit et le jour ? Je ne vois même plus la différence entre l’un et l’autre, entre séries télévisées et chaînes d’infos en continu… Elle continue :
Voyage voyage
Ne t’arrête pas
Au d´ssus des barbelés
Des cœurs bombardés
Regarde l´océan
Desireless, chantait ça dans les années 80. Sans désir elle était ! Elle en avait de la chance ! Moi j’en ai des désirs ! Je veux des fleurs, du parfum, un jardin et du vin…
J’ai juste un tire-bouchon inutile qui traîne sur la toile cirée entre biscottes et beurrier.
Lire ? J’ai un bouquin que ma sœur m’a offert à Noël, où l’ai-je mis ?
Ah le voilà, c’est Le parfum de l’Hellébore de Cathy Bonidan.
J’irai faire des courses plus tard…
Là, je me recouche !

https://www.babelio.com/livres/Bonidan-Le-parfum-de-lhellebore/900530
(Je précise que je ne l’ai pas lu
et que ce sont les mots imposés qui me l’ont… imposé)
Ce texte est écrit avec une contrainte de 4 mots, donnés par Bernadette:
Parfum, hellébore, tire-bouchon, et voyage. .
Vous pouvez m’en envoyer 6 autres.
Caillou, le 20 avril 2020
Et un autre texte envoyé par Annick
Hellébore quand il pleut
a les cheveux en tire-bouchon
Il voyage dans sa tête pleine de trous
où ventent les parfums funestes
de la désespérance et les bruits du silence
qui s’insinuent fatalement
cherchant ses pensées salies par les odeurs fétides
du bitume.
Dans le jardin… la suite!
Un autre texte, avec les mêmes mots, envoyé par Françoise: On n’était pas bien loin ... Avec mes 6 mots, j’ai écrit ça ... Aïe ! Une douleur dans les reins au bout d’un bon moment de travail dans le jardin. Elle se redresse doucement, plante la bêche dans la terre, pose ses deux mains en coque sur le haut du manche, et son menton par dessus. Un instant reposer le dos, un instant laisser le regard voguer au devant de soi. Regarder avec bonheur et gratitude les oiseaux, ceux qui s’abreuvent dans le lac tout proche . Ils se laissent porter par le vent, puis se jettent vers la surface de l’eau où ils viennent prendre un peu de quoi continuer le chemin, et d’un coup d’aile, repartent vers le ciel, légers et déterminés. Ça ressemble à un poème, parfois à un mirage: c’est si rapide, si simple, si merveilleux...c’est déjà fini ? Les yeux reposés reviennent vers le jardin. La main reprend la bêche, les jambes se replacent et le travail reprend . Il a tout son sens . Dans la fermeture de la terre, il y a toute l’ouverture de la vie . Francoise
Et un autre texte envoyé par Annick
Depuis quelques jours les oiseaux s’en donnent à coeur joie
Au milieu des aiguilles de pin qui jonchent mon balcon
Le vent, violent, s’est levé et tourne en bourrasque
et bourrisque les têtes échevelées et décérébrées
Au loin, un mirage. Covid ne vois-tu rien venir ?
Tandis que la bêche de bois attendrit le sol asséché
La douleur et la perte avancent à grand pas vers le ciel
Avant qu’une voix de stentor annonce la fermeture de Carrefour City plus tôt que prévu.
Dans le jardin

Le vent secoue les arbres, disperse un peu partout les fleurs des cerisiers. Le jardin est si blanc. Elle pourrait croirait qu’il neige.
Demain il va pleuvoir, le vent va se calmer.
Alors elle prend sa bêche.
Pour préparer des lignes où elle ira planter ses semis de tomates.
Les merles vont se cacher.
Sous la haie. Ils attendent.
La bonne terre tendre est un garde manger.
Les oiseaux sont comme ça, ils mangent au bon moment ce qu’il y a à prendre et n’ont même pas idée d’en mettre de côté.
(Depuis la Préhistoire les hommes prévoient, engrangent, les récoltes s’entassent, pour enrichir les uns, pour nourrir des armées !)
La ligne d’horizon au dessus de l’Ariège est fermée par la crête du premier grand coteau, dominée par un arbre très beau, comme un gardien, à l’entrée de Goyrans, en dessous des nuages.
Ce n’est pas un mirage. C’est une vraie position.
Un guetteur magnifique dominant la région.
Si un jour ils le scient et l’abattent pour construire,
la superbe villa d’un riche toulousain, (un docteur, un notaire, ou bien un PDG)
elle vivra cette douleur si dure à oublier.
Le temps des assassins se nomme immobilier.
En attendant, elle est, toute seule, dans son jardin.
C’est un matin d’avril et c’est autorisé.
Ce texte est écrit avec une contrainte de 6 mots, donnée par Françoise:
Oiseau, vent, bêche, mirage, douleur et fermeture.
Vous pouvez m’en envoyer 6 autres.
Caillou, le 19 avril 2020
Hubris* en 35 m2
Le canapé est un château, si j’en tombe c’est les crocodiles, qui me mangeront en ratatouille.
Déjà des heures que ma Juliette, qui a 6 ans, chante en criant cette scie qui m’arrache la tête.
Sœur Anne ne vois tu rien venir ? Je lui réponds de plus en plus faiblement : Je ne vois rien que le soleil qui poudroie et l’herbe…
Depuis déjà plusieurs semaines nous avons les enfants dans le studio.
Mais c’est quoi cette magouille ? Je lève les yeux de mon clavier. Elle me réclame de nouveau des chatouilles ?
Son frère Arnaud attaque les murs, avec des feutres. Il gribouille. J’ai beau crier qu’il ne faut pas le faire, même avec des feutres lavables, il me faudra bien retapisser plus tard. Je ferais venir un artisan, à moins que je les pose moi-même tous ces rouleaux de papiers peints. Il faudra que je patouille dans la colle. Rendre le studio en état.
Leur mère s’isole sous la douche, le seul endroit où l’on est seul, avec les toilettes bien sûr. Je repense au journal d’Anne Franck*où l’adolescente se moque de ce monsieur qui y passe des heures.
Et moi j’essaie bien de bosser sur mon ordinateur rebelle mais le wifi se met en veille.
Je n’en peux plus ! Des heures pour télécharger 2 feuilles A4 ! Le télétravail, facile à décider dans l’Olympe des dieux et leurs bureaux ministériels et bien plus difficile à mettre en place dans mon studio de 35 m2
Alors vivement qu’on sorte, tous les quatre, hurler dans la rue.
* Hubris : Orgueil et démesure
* https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Journal_d’Anne_Frank#Personnages
Ce texte est écrit avec une contrainte de 6 mots, donnée par Yves:
Chatouille, gribouille, patouille, ratatouille, magouille et rebelle
Vous pouvez m’en envoyer 6 autres.
Caillou le 18 avril 2020
Et un autre texte envoyé par Annick
Pour la énième fois Gribouille grésille sur le disque usé
tandis que d’une main nonchalante, Elle gratouille le cou du chat
qui n’apprécie plus du tout les chatouilles depuis qu’Elle lui a interdit de sortir
De patouilles en ratatouilles, elle se dit qu’elle pourrait bien
s’énerver, se révolter, s’anarchiser, mais ce n’est pas une rebelle
et reprend d’une main nonchalante les gratouilles et les papouilles.
Derrière la fenêtre
Elle a le front posé sur le frais de la vitre. Elle observe la rue qui descend vers le fleuve. Il fait encore bien froid dehors et le soleil qui peine à percer les nuages n’a pas encore chauffé la ville qui s’éveille. Mais voilà les enfants qui partent pour l’école. Après ces longues semaines d’enfermement enfin pouvoir se retrouver. Elle entend les rires et les portes qui claquent. Elle suit de son regard les mamans qui les mènent, qui se saluent, heureuses, de pouvoir se revoir, échanger sur le temps, se donner des nouvelles…
Une radio, derrière elle, lui parle de Christophe, celui qui vient de disparaître, ce chanteur marqué par les années d’excès. Il l’avait fait rêver, il l’avait fait danser, bien des années plus tôt quand elle dansait encore. Et on entend son chant qui prend bien tout l’espace, dans la chambre peut-être, surtout dans ses souvenirs.
Les enfants à l’école, la rue se met au calme. Les fenêtres ouvertes se parent de tous les draps. On aère. On secoue. Le printemps est partout. Les murs vêtus de brique se colorent en rouge sous la caresse chaude de ce très beau matin. Elle y voit un chemin.
Comme un message, juste un moment de grâce. Sentir l’instant présent, en jouir pour ce qu’il est, sans chercher à le retenir. Tourner le dos, définitivement aux regrets qui la hantent. Ne plus se souvenir et ce matin, choisir enfin la vie.
Ce texte est écrit avec une contrainte de 6 mots, donnée par Josette:
Soleil, chant, rouge, chemin, regrets, vie.
Vous pouvez m’en envoyer 6 autres.
Caillou, le 17 avril 2020
Première sortie
Le chemin sentait la noisette. Nous étions en octobre 2020 et pour la première fois l’homme sortait se promener, seul, dans ce bois, le long du fleuve. Âgé, grand, mince, il marchait un peu vouté, d’un pas lent, comme exténué par ces quelques huit mois d’immobilisation forcée. Sa marche était celle d’un grand convalescent faisant ses premiers pas dans les couloirs des hôpitaux. Les cheveux, très longs, cachaient son front et on ne pouvait voir que ses yeux puisqu’un masque en tissu lui mangeait littéralement le visage.
Dans sa maison, pour fêter cette libération, ils avaient bu un peu de champagne en grignotant quelques toasts aux crevettes. La veille au soir, le président avait annoncé la levée partielle du confinement sanitaire au journal télévisé. Et ils avaient préparé cet apéritif pour en fêter le premier jour. Allait-on retrouver le sentiment de faire partie de la société ? D’être utile ? D’être fort ? Il ne le croyait pas. Presque certain que cette assignation à résidence avait cassé en lui bien plus que sa vitalité musculaire, il avait voulu sortir seul, pour la première fois.
L’homme qui marchait dans le sous bois retrouvait cette sensation ancienne : la liberté, celle d’aller où il voulait. Mais il avait compris que cette liberté ne serait plus jamais, pour lui, associée à l’innocence et à l’inconscience de sa propre faiblesse. Il n’y aurait plus jamais de nudité face au soleil.
Ce texte est écrit avec une contrainte de 6 mots, donnée par ma compagne: noisette, masque, champagne, crevette, nudité, soleil.
Vous pouvez m’en envoyer 6 autres.
Caillou, le 16 avril 2020
« Face à la pandémie, retournons la « stratégie du choc » en déferlante de solidarité ! »

Gerhard Altzenbach • Public domain
Je relaie cette tribune et je signe cette pétition
car cela me paraît très important
pour la réflexion et l’action.
Caillou, le 22 mars 2020
https://covid-entraide.fr/signe-la-petition-pour-lentraide/
Face à l’ampleur du bouleversement provoqué par la pandémie Covid-19, près de 230 médecins, infirmiers, réanimateurs, paysans, artistes, chercheurs, scientifiques, syndicalistes, éditeurs et autres personnalités appellent à l’entraide et à l’auto-organisation dans cette période de confinement : « Il n’y aura pas de “sortie de crise” sans un bouleversement majeur de l’organisation sociale et économique actuelle »
Depuis une semainela France est entrée dans une nouvelle réalité vertigineuse. Le Covid-19 n’est plus une « petite grippe », selon nos gouvernants, mais la « pire crise sanitaire depuis un siècle ». Un choc intime qui nous fait trembler pour nos proches et toutes les personnes particulièrement fragiles. Une secousse géopolitique qui fait s’effondrer la mondialisation néolibéralecomme un château de cartes. 2019 avait été une année d’incendies ravageurs en Australie, Amazonie et ailleurs, et d’immenses soulèvements populaires. 2020 a d’ores et déjà les traits d’une paralysie totale, une crise systémique majeure.
Cette pandémie achève de rendre irrespirable la vie dans un système politique et économique délirant, néfaste, mais surtout inutile au moment où un immense besoin de soin se fait sentir. Après être resté attentiste pendant un mois et demi, Emmanuel Macron a promis, pour ne pas perdre la face, que « l’État paiera […] quoi qu’il en coûte ». La « mobilisation générale » est décrétée. « Nous sommes en guerre », paraît-il, contre un « ennemi invisible ».
Face à cette rhétorique militariste, nous affirmons une autre logique. À « l’union nationale » nous préférons l’entraide générale. À la guerre, nous opposons le soin, de nos proches jusqu’aux peuples du monde entier et au vivant. En France, comme dans les autres pays, nous allons tenir ensemble pour faire face à l’épidémie. Nous allons transformer l’isolement imposé en immense élan d’auto-organisation et de solidarité collective.
Avec nos voisin-e-s, nos ami-e-s, nos familles, nos proches, nos collègues ; dans nos immeubles, nos rues, nos quartiers, nos villes et nos villages ; notamment en utilisant les réseaux sociaux, nous allons construire l’entraide à la base. Pour aider les plus fragiles qui ne peuvent pas sortir à obtenir de la nourriture. Pour garder les enfants de celles et ceux qui doivent continuer de travailler. Pour partager des informations vérifiées sur la situation. Pour se donner des nouvelles et se réconforter dans cette situation déchirante. Pour soutenir les plus précaires dans leurs luttes pour vivre. Pour faire face à une crise économique, bancaire et financière qui s’annonce dévastatrice malgré les annonces faussement rassurantes des banques centrales. En restant chez nous pour le moment, mais dans la rue dès que possible.
Face à l’ampleur du bouleversement, même Emmanuel Macron appelle à « innover dans la solidarité ». Mais nous ne sommes pas dupes du fameux « en même temps » : l’entraide que nous construisons n’est pas l’auxiliaire d’un État néolibéral défaillant. Elle ne sera pas le cheval de Troie d’une future « stratégie du choc » à base de télétravail, de « volontariat citoyen » dans des services publics détruits, et de poursuite dans la destruction des acquis sociaux au nom de « l’état d’urgence sanitaire ».
Notre solidarité est celle du peuple, de ceux d’en bas, qui se serrent les coudes pour survivre et pour vivre dignement. Elle n’a rien à voir avec celle des élites mondiales – facilement dépistées, elles -, qui se retranchent dans leurs palais dorés, protégés et désinfectés pendant que les soignant-e-s sont « au front » sans moyens et fabriquent leurs propres masques de protection en prenant tous les risques.
Pendant que les travailleurs-euses et instituteurs-trices gardent leurs enfants, sans consigne officielle pour se protéger, s’exposant à une contamination. Pendant que les plus précaires, les sans logis, sans papiers, sans réseaux sociaux, les intérimaires sans chômages partiels, les « indépendants » contraints au travail en danger ou sans activité, seront encore plus frappé-e-s par la crise. Pendant que les « déjà confiné-e-s », les migrant-e-s enfermé-e-s en centres de rétentions et les prisonnier-e-s voient leur situation encore aggravée.
Jamais l’alternative n’a été si claire, le scandale si palpable : nous jouons notre vie pendant qu’eux gèrent l’économie.
L’entraide que nous allons construire s’inscrit dans le sillage du soulèvement des peuples partout dans le monde au cours des derniers mois, du Chili au Liban, de l’Algérie au Soudan. Cette vague a répandu sur la planète la nécessité de mettre nos corps en jeu. Le Covid-19 rend indispensable, pour l’heure, leur confinement. Mais révolté-e-s ou confiné-e-s, nous mourrons d’un système qui recherche le profit et l’efficacité et pas le soin, le pouvoir et la compétition et pas l’entraide.
Cette épidémie ravageuse n’est pas une simple réalité biologique. Elle est amplifiée par les politiques néolibérales, la destruction méthodique de l’hôpitalet de l’ensemble des services publics. Si ce virus tue autant, c’est aussi parce qu’il n’y a plus assez de soignant-e-s et de lits, pas assez de respirateurs ou parce que l’hôpital tend à devenir une entreprise à flux tendu. Et si nous applaudissons chaque soir à 20h les soignant-e-s, c’est aussi pour contenir notre colère contre les gouvernant-e-s qui savaient que la tempête arrivait depuis deux mois sans rien faire.
Nous appelons donc à renforcer la solidarité et l’auto-organisation pour faire face à la pandémie et la crise systémique, partout où c’est possible, sous toutes les formes imaginables, tout en respectant la nécessité absolue du confinement pour freiner la propagation. Plus particulièrement, nous appelons à rejoindre le réseau de solidarité auto-organisé #COVID- ENTRAIDE FRANCE (https://covid-entraide.fr/)qui se constitue dans des dizaines de lieux depuis une dizaine de jours. Nous invitons à créer des groupes d’entraides locaux en ligne et sur le terrain, de notre hameau à notre village, de notre immeuble à notre ville. Nous appelons à recenser les centaines d’initiatives qui se créent à travers une cartographie collaborative (https://covidentraide.gogocarto.fr).
Ne restons pas sidéré-e-s face à cette situation qui nous bouleverse, nous enrage et nous fait trembler. Lorsque la pandémie sera finie, d’autres crises viendront. Entre temps, il y aura des responsables à aller chercher, des comptes à rendre, des plaies à réparer et un monde à construire. À nous de faire en sorte que l’onde de choc mondiale du Covid-19 soit la « crise» de trop et marque un coup d’arrêt au régime actuel d’exploitation et de destruction des conditions d’existence sur Terre. Il n’y aura pas de « sortie de crise » sans un bouleversement majeur de l’organisation sociale et économique actuelle.
Il y aura un avant et un après. Nous sommes pour l’instant confiné-e-s, mais nous nous organisons. Et, pour sûr, nous reprendrons les rues, les jardins, les outils de travail, les moyens de communication et les assemblées, ensemble.
La stratégie du choc doit s’inverser. Cette fois-ci le choc ne servira pas à affermir le contrôle, le pouvoir central, les inégalités et le néolibéralisme, mais à renforcer l’entraide et l’auto-organisation. À les inscrire dans le marbre.

INFOS :
- Site internet : https://covid-entraide.fr
- Inscrivez votre groupe local ici : https://covidentraide.gogocarto.f
- Contact : covidentraidefrance@riseup.net
LIEN VERS LA PÉTITION : https://covid-entraide.fr/signe-la-petition-pour-lentraide/
Signature pour les associations et organisations : merci d’envoyer votre signature à entraidepandemie@riseup.net(en précisant l’organisation dans l’objet du mail)
Premiers signataires :
Corinne Morel-Darleux, autrice, élue régionale et militante éco-socialiste
Pablo Servigne, chercheur in-terre-dépendant
Éric Beynel, co-délégué général de Solidaires
Cécile Gondard-Lalanne, co-déléguée générale de Solidaires
Hugo Huon, pour le Collectif Inter-Urgences
Matthieu Bellahsen, psychiatre et praticien hospitalier
Sarah Kilani, médecin anesthésiste-réanimateur
Benoit Blaes, président du Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes (SNJMG)
Sayaka Oguchi, médecin généraliste, trésorière du SNJMG
Emmanuelle Lebhar, interne en médecine générale, chargée de mission au SNJMG
Julien Aron, médecin néphrologue, chargé de mission au SNJMG
Vladimir Adrien, interne de l’AP-HP
Jonas Pochard, anesthésiste réanimateur
Amaury Delarge, réanimateur
Françoise Brun, infirmière
Catherine Fayet infirmière
Benjamin Royer, psychologue clinicien
Franck Prouhet, médecin généraliste
Claire Bourgogne, médecin généraliste
Marcy Pondi, anesthésiste-réanimatrice
Joachim Müllner, médecin psychiatre
Amina Ben Salah, médedecin doctorante en Neurosciences
Sabrina Ali Benali, médecin à Paris
Ben Omrane Choukri, médecin à Paris
Stéphane Lerivray, infirmier anesthésiste
Michel Robin, infirmier
Marie Llorens, infirmière urgences
Mathilde Martinot, psychiatre en hôpital public
Dominique Seydoux, médecin retraité
Aurélien Barrau, astrophysicien
Annick Coupé, secrétaire générale d’Attac
Aurélie Trouvé, porte parole d’Attac
Raphaël Pradeau, porte parole d’Attac
Maximes Combes, porte parole d’Attac
Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération Paysanne
Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du Droit au Logement
Cyril Dion, réalisateur
Geneviève Azam, essayiste
Benoît Teste, secrétaire général de la FSU
Annie Déan, porte-parole du MAN
Jean-François Pellissier, porte-parole d’Ensemble!
Josep Rafanell i Orra, psychologue et écrivain
Patrick Farbiaz, cofondateur du collectif Pour une Ecologie Populaire et Sociale (PEPS)
Virginie Maris, philosophe
Christophe Bonneuil, historien
Leslie Kaplan, écrivaine
Dominique Méda, sociologue
Céline Pessis, historienne
Baptiste Monsaingeon, sociologue
Ludivine Bantigny, historienne
Johan Badour, éditeur
Cervaux non Disponibles
Partager c’est Sympa
Miguel Benasayag, philosophe
François Cusset, philosophe
Dominique Bourg, philosophe
Jean Gadrey, économiste
Samuel Hayat, politologue
Isabelle Cambourakis, éditrice
Jean-Marie Harribey, économiste
Audrey Vernon, comédienne
Xavier Ricard Lanata, essayiste et haut-fonctionnaire
Yves Cochet, président de l’institut Momentum
Pierre Khalfa, économiste, Fondation Copernic
Catherine Zambon, autrice
Serge Quadruppani, écrivain
Nathalie Quintane, écrivain
Sezin Topçu, sociologue
Alain Damasio, écrivain
Jérôme Baschet, historien
Bernard Friot, sociologue
Stéphane Lavignotte, théologien
Elise Lowy, cofondatrice de PEPS
« L’1consolable », rappeur
Kolin Kobayashi, journaliste in-terre-dépendant
Jean-Jacques Delfour, philosophe
Gauthier Chapelle, chercheur in-Terre-dépendant et co-auteur
Paul Ariès, politologue,
Dénètem Touam Bona, écrivain-artiste
Vincent de Gaulejac, président du réseau international de sociologie clinique
François Jarrige, enseignant-chercheur en histoire
Arnaud Muyssen, médecin à Lille
Anne Thebaud Mony, sociologue
Jacques Fradin, économiste
Laure Noualhat, documentariste
Pierre André Juven, sociologue de la santé
Cyril Pedrosa, auteur de bande dessinée
Anne-Sophie Novel, journaliste
Fabrice Flipo, philosophe
Sophie Gosselin, revue Terrestres
Maxime de Rostolan, fondateur de Fermes d’Avenir
Frédéric Boone, chercheur en astrophyisque
Vanessa Morisset, critique d’art et enseignante
Federico Tarragoni, sociologue
Sofia Meister, chercheuse IRD
Lucie Davy, avocate membre du Syndicat des Avocat de France
Annie Ghiloni, militante du MAN
Louis-Marie Barnier, syndicaliste, sociologue du travail
Lecomte Gabrielle, sociologue
Antoine Back, conseiller municipal à Grenoble
Léna Dormeau, chercheuse en philosophie politique
Laurent Cauwet, auteur, éditeur
Julien Théry, historien
Anne Marchand, chercheuse en socio-histoire
Fabrice Vigne, écrivain
Rose-Marie Lagrave, sociologue
Stéphane Douiller, professeur émérite de philosophie de l’Université Paris 8
Gérard Bras, philosophe
Aurélien Gabriel Cohen, revue Terrestres, Université de Paris
Philippe Boursier, professeur de SES
Loïc Steffan, co-fondateur La Collapso Heureuse
Pierre-Eric Sutter, co-fondateur de l’OBservatoire des VEcus du COllapse (OBVECO)
Marie Didier, écrivain médecin
Ana Rougier, journaliste indépendante
Alexis Judic, artiste plasticien
Roger Champ, militant de la Confédération Nationale du Logement
Nelly Massera, artiste et réalisatrice
Camille Riquier, scénographe
Fred Ortuno, association Art Factories
Étienne Ciapin, sociologue
Anthony Laurent, journaliste scientifique, co-fondateur de Sciences Critiques
Lola Ostier, médiatrice socio-éducative
Patrice Bride, coopérative « Dire le travail »
Anne Jollet, historienne
Jean-Luc Gautero, enseignant-chercheur
Raphaelle Doyon, maîtresse de conférences
François Jacquet, ingénieur de recherche
Gilles Guégan, scénographe-jardinier
Cyril Piou, chercheur en écologie
Agnès Valentin, comédienne
Coraly Zahonero, comédienne
Nicolas Le Coq, professeur des écoles
Sandrine Costamagno, directrice de recherche CNRS
Philippe Merlant, journaliste et conférencier gesticulant
Grégory Poinsenet, cofondateur de Sorry Children
Pierre Charrier, cofondateur de Sorry Children
Fabienne Brugel, metteuse en scène
Raphaël Sarfati, libraire
Pierre-Jean Heude, régisseur
Guillaume Bagnolini, philosophe
Saskia Cousin, anthropologue
David Dupuis, anthropologue et psychologue clinicien
Delphine Schmoderer, plasticienne
Josépha Dirringer, juriste
Makis Solomos, musicologue
Leïla Frouillou, sociologue
Igor Babou, professeur à l’université Paris Diderot
Stéphane Bikialo, enseignant-chercheur en littérature
Gwen de Bonneval, auteur de bande dessinée
Bernard Schéo, enseignant-chercheur
Olivier Roueff, sociologue
Sidi Mohammed Barkat, enseignant-chercheur
Guillaume Lecamus, metteur en scène
Stephen Bouquin, sociologue
Sarah Mekdjian, enseignante-chercheure
Myriem Augier, sociologue
Hélène Tordjman, économiste
Kolja Lindner, politiste
Antoine Leblois, économiste
Solène Derrien, plateforme pyrénéenne d’observation atmosphérique
Laurence Protteau, sociologue
Laurence Charlier, anthropologue
Mari Oiry Varacca, géographe
Clément Barthélémy, docteur en écologie
Jean-Michel Hupé, chercheur CNRS en neurosciences et écologie
Mattia Paco Rizzi, architecte
Denys Piningre, cinéaste
Rosemary Faulkner, traductrice
Pascal Maillard, univesitaire et syndicaliste
Othmar Eipeltauer, paysan arboriculteur
François Gèze, éditeur
Christelle Rabier, maîtresse de conférence
Pierre Lénel Sociologue
Rada Iveković, universitaire
Julien Wosnitza Fondateur Wings of the Ocean
Thomas Berther, fédération Habicoop
Nicolas Voisin, La Suite du Monde
Christophe Masutti, chercheur
Stuart Pluen Calvo, éditeur
Audrey Boulard, le Vent se Lève
Floryan Reyne, naturopathe
Chantal Charlot, formatrice
Sonja Dicquemare, architecte enseignante
Samuel Pinaud, sociologue
Françoise Bressat-Blum, présidente de l’Université Populaire de Lyon
Philippe Arnaud, co-secrétaire de Solidaires 33
Anne Macou-Lescieu, el’cagette Roubaix
Adèle Cassigneul, chercheuse
Mikael Motelica, enseignant-chercheur
Philippe Birgy, enseignant-chercheur
Claude Crestani, psychologue du travail
Maria da Fonseca, enseignante-chercheuse
Brian Padilla, écologue
Philippo Michel, association LESA
Frédéric Verhaegen, université de Lorraine
Guillaume Pellerin, physicien et informaticien
Marjorie Keters, association ACIDES
Agatha Frankowska-Thuinet, professeur des écoles
Sophie Hoarau, comédienne
Benoît Hodeu, archéologue
Emmanuel Ferrand, association La Générale
Sarah Labelle, maîtresse de conférence
Jean Fauché, pour Alternative et Autogestion
Philippe Eustachon, metteur en scène
Tunvezh Gwlagen-Grandjean, journaliste radio
Amel Dahmani, secrétaire de Sud Collectivités Territoriales
Florence Vallero, intermittente du spectacle et auteure
Cyril Dutech, chercheur en biologie évolutive
Anthony Pecqueux, sociologue
François Piquemal, enseignant en lycée professionnel
Jean Bourdoncle, animateur de Lien et Changement
Laurent Eyraud-Chaume, comédien
Anne Isla, économiste
Jérémy Bonner, enseignant
Frédérique Bey, ingénieure
Julien Jourdan, enseignant
Stéphane Pauvret, artiste scénographe
Étienne Gérard, sociologue
Marie-Paule Frisot, trésorière du Man Moselle
Katja Ploog, enseignante-chercheuse
Anne-Emmanuelle Berger, universitaire
Josiane Bru, anthropologue
Jim Petit, musicien
Sibylle d’Orgeval, réalisatrice
Catherine Scheer, anthropologue
Antoine Lamer, Data Scientist
Nicolas Paris, informaticien
Stéphanie Mariette, chargée de recherche à l’INRAE
Marina Sou, pour Libres Apprenants du Monde
Frédéric Bourdon, conseiller municipal de Vitry-sur-Seine
Jules Desgouttes, coordinateur de Art Factories
Hélène Oblet, ingénieure territorial
Marie Cuillerai, professeure des universités
Nadine Forte, enseignante
Françoise Bénet, professeur de danse
Jacques Pabst, comédien
Monique Dental, réseau féministe Ruptures
Franck Gaudichaud, enseignant-chercheur
Thierry Élias, docteur en optique-atmosphérique
Philippe Élusse, réalisateur
Laure Teulières, historienne
Jimmy Markoum, enseignant
Marc Pion, paysan gesticulant
Martine Minne, pour Attac Flandres
Cette tribune est publiée simultanément sur plusieurs médias : Médiapart, Reporterre, Bastamag, Lundi-Matin, Terrestres, Politis,Rapports de Force, Mouvements, Regards et Contretemps